Ntsengueleza et le Djinn
Il était une fois une petite fille s’appelait Ntsengueleza. Chaque jour comme d’habitude, Ntsengueleza allait à l’école coranique très tôt. Elle était très gentille et très intelligente. Elle était ainsi aimée par tous ses camarades. Son école coranique était l’unique de la région. Leur maître de l’école coranique était un Djinn. Il mangeait des souris et buvait à tire larigot du café. Des élèves disparaissaient dans son école et on disait qu’il les mangeait. Surtout ceux qui ne lui versaient pas des droits d’écolage. Il était très méchant, mais adoré malgré tout par les villageois qui trouvaient son enseignement efficace. Sa méchanceté était fonction de la précarité de sa nourriture ; il lui était rare de trouver des souris.
Un jour, le maître demanda à ses élèves de nettoyer la salle des cours qu’il enseignait le coran : une vaste pièce carrelée, brillante de beauté et d’attrait. Il partit après à la recherche de souris en laissant ses élèves seuls. Le maître Djinn avait cinq tambours, qu’il utilisait pour attirer les souris. Muni de l’un de ces instruments, il partit ambiancé à la campagne pour capturer ce qui est un gibier pour lui. Il ne s’était jamais enlivré mais inventait par son imagination ses ruses quand il partait à la chasse des souris. En quittant chez lui, il y avait laissé les quatre autres dans la salle où il dispensait ses cours. A sa sortie, quatre de ses élèves s’emparèrent des tambours pour jouer avec. C’est la première fois qu’ils osaient toucher un tambour de leur maitre. Ils jouaient maladroitement et le son qui sortait n’avait ni rythme ni harmonie. Il se dégageait une impression de tohubohu. Chaque élève y mettait du sien transpirant en tapant le tambour de toutes ses forces, en poussant des ouf, car ils se sentaient libres. Que du charivari dans la cours du maitre Djinn ! Un endroit saint dans lequel on n’entendait que des paroles de Dieu. Quatre autres élèves qui savaient jouer prirent les tambours. Ils se sont appropriés de ses instruments et ont joué un air gracieux et envoutant qui a mis l’école en état de joie et les élèves chantaient, dansaient en nettoyant la salle. Tout à coup Ntsengueleza trébucha, glissa sans réussir à éviter de tomber à terre. Il atterrit sur l’aiguière du maître Djinn pleine du café. Tous les élèves furent inquiets et arrêtèrent la musique. Elle avait le visage hurluberlu. Elle recommanda aux autres de raconter au maitre que ce n’était qu’un accident, mais ils lui répondirent qu’ils avaient peur puisque le maitre était méchant, et sans lui dire la vérité le maitre allait les punir. Ses camarades savaient que s’ils ne disent pas la vérité le Djinn allait dire que tout est de leur faute. Ntsengueleza partit très vite de l’école coranique pour se rendre à la maison. Elle raconta à sa mère ce qui lui est arrivé à l’école coranique. Sa mère qui n’ignorait pas la méchanceté du maître proposa à sa fille d’aller s’enfermer dans sa chambre. Elle lui dit : « N’ouvre la porte que si tu entends ma voix timbrée, si tu lui ouvres, il t’attrapera. Et fais bien attention, car si le Djinn ne mange qu’une seule souris sa voix se transforme. » Ntsengueleza répond à sa mère : « comment tu le sais ? » Sa mère lui répondit qu’elle aussi était disciple du maitre Djinn. Ntsengueleza obéit à sa mère sans discuter.
De retour à l’école coranique avec son panier plein de souris, dès qu’il ouvrit la porte, les élèves se sont tus en prenant un comportement très sérieux. C’était un silence comme si il y avait un roi qui était mort. Personne n’osait tousser. Il y avait aussi des désordres. Dès qu’il entra dans sa cour, le Djinn fixa le regard là où se trouvait son aiguière.
Surpris de la trouver cassée, il demanda : « Qui a cassé mon aiguière ? »
Personne n’ose ouvrir la bouche. Le Djinn qui avait perdu le contrôle répéta avec colère si vous ne me dites pas qui a cassé mon aiguière, je vous mange tous. Les élèves tremblèrent fortement et sans arrêt. Puis avec une voix tremblante, une élève lui répondit : « C’est Ntsengueleza qui l’a cassée et elle est allée se cacher chez elle. »
La mère de Ntsengueleza traumatisée par la peur se mit à la porte et chanta : « Ma fille ouvre-moi la porte, ouvre-moi la porte. C’est moi ta mère. » Et puisque Ntsengueleza entendit la voix timbrée de sa mère, elle ouvrit la porte et sa mère entra pour lui donner à manger et à boire.
A l’école coranique, la peur régna. Aucun élève n’ose venir en retard et chacun d’eux lisait les versets correctement et à haute voix pour faire plaisir au maitre. L’absence de Ntsengueleza se fit sentir, car elle était la plus petite et la plus intelligente.
La colère du maitre ne faisait que s’accroitre de jour en jour et le troisième jour après l’accident, le maitre décida d’aller chez la mère de Ntsengueleza pour l’enlever. Arrivée devant la porte de la mère de Ntsengueleza, il rencontra la mère de Ntsengueleza et lui raconta le mal que sa fille lui avait fait. La mère de Ntsengueleza se prosterna à ses pieds et le supplia de pardonner son unique enfant ce que le Djinn refusa avec beaucoup de colère. Pour lui, seule la vie de Ntsengueleza qui pourra valoir son aiguière.
Le Djinn se mit à chanter avec sa grande voix : « Ma fille, ouvre-moi la porte, ouvre-moi la porte. C’est moi ta mère, ouvre-moi la porte ». Puisque Ntsengueleza entendit la grande voix du Djinn, elle trembla et n’osa pas ouvrir la porte. Le Djinn alla chez le roi et dit : « Mon roi, mon roi lave-moi la langue pour que ma voix soit timbrée ». Le roi lui rendit ce service, car le Djinn qui était le seul maitre de l’école coranique de la région était estimé par tout le monde y compris le roi. Le Djinn était violent et ne craignait personne. Le roi après avoir terminé son opération mystérieuse avait dit au Djinn : « Ne mange surtout pas des souris, car si tu en manges une, ta voix deviendra plus grave qu’avant ». Le Djinn sortit avec le sourire aux lèvres. Il se mettait à chantonner le long du chemin en essayant sa belle voix qui ressemblait à celle des chanteuses, voire d’une choriste. A mis chemin, le Djinn vit une belle souris qui passait devant lui : « quel affront ! C’est une menace ou quoi ? Une souris qui passe devant moi ? Je n’ai jamais vu une chose pareille. Je sais que dès qu’une souris me voit, elle prend la fuite. Aujourd’hui, les souris n’ont plus peur de moi. Je ne peux tolérer une chose pareille. » Il attrapa la souris et l’avala d’un seul trait se disant qu’en l’avalant cela ne peut pas déranger sa belle voix.
La voix du Djinn est devenue plus grave qu’avant. Il retourna encore chez le roi pour lui demander de lui venir en aide. En sortant de chez le roi, il n’a pas pu se retenir, il a encore avalé une autre souris. Cette fois, il a supplié le roi et juré devant lui qu’il ne mangera plus de souris avant qu’il ne puisse aller chez la mère de Ntsengueleza et en finir avec sa mission. Le roi refit l’opération avec la seule condition que ça soit la dernière fois. Aussitôt sorti de la maison royale, il vit une souris. Il l’attrapa par la queue, la regarda et dit : « sache que cette fois tu as eu de la chance. Je m’empresse pour une grosse proie et non pour un amuse gueule comme toi. » Il la jeta loin de ses yeux.
La souris jetée par le Djinn était l’œuvre d’un grand maitre sorcier qui voulait sauver Ntsengueleza. La souris suivit le Djinn en cachette et à chaque fois elle se montra devant ; cela mettait au Djinn l’eau dans la bouche. Il disait : « Qu’elles sont nombreuses ces souris aujourd’hui. Si je n’avais pas cette mission à accomplir …» Le Djinn se mit devant la porte de la chambre de Ntsengueleza et chanta : « Ma fille, c’est moi ta maman, ouvre-moi, ouvre-moi la porte. Je t’ai apporté à manger et à boire. » Tous les habitants de la maison voyaient le Djinn, mais il était redoutable, personne n’ose ouvrir la bouche de peur qu’il ne soit attrapé.
Le Djinn avait pu imiter le timbre de la voix de la mère de Ntsengueleza. Elle ouvrit la porte de cette dernière et le Djinn l’attrapa. Tout le monde pleurait dans la maison, la mère de Ntsengueleza se jetait à terre et pleurait comme une enfant. Elle se disait qu’elle ne reverrait plus sa fille. Le Djinn trainait la fille telle une chèvre en direction de la forêt. En ville, il habitait l’école, mais il avait une maison dans la forêt que personne ne connaissait. On savait tout simplement que parfois il s’absentait toute une journée, mais on ne savait où il allait.
Le jeune maitre sorcier qui se transformait en souris suivait toujours le Djinn tout en se cachant, car il savait que cette fois si le Djinn qui avait déjà capturé Ntsengueleza l’attrapait, il ne verra plus le soleil. Le jeune maitre sorcier qui s’est transformé en souris était prudent. Il ne se montrait plus devant. Il suivait le vraiment en se cachant.
Au cours du chemin, Ntsengueleza en pleurant ne cessa de supplier son maitre de l’école coranique de lui laisser la vie sauve. Elle lui raconta tout ce qui se passait le jour de l’accident. Le Djinn faisait la sourde oreille. Arrivé dans sa maison de campagne, il lui avait dit tout simplement que je ne pourrais pas te laisser, tu as cassé mon aiguière pleine de café, c’était mon seul héritage. Je l’ai eue de mon père qui était lui aussi maître. C’était une aiguière magique. Chaque matin, elle était toujours pleine de café. C’est pour cela que je ne buvais que du café chaque matin. Tu as pourri ma vie, Ntsengueleza. Tu m’as privé de mon seul héritage. Il faisait nuit, je dois rentrer en ville, je te laisserai ici et ne criait surtout pas, car personne ne pourra t’entendre d’ici. Demain, je viendrai avec tous mes ingrédients et je me ferai une bonne soupe. Personne n’est sorti d’ici vivante, alors tu es entrée, je dois te manger. Il a sorti un gros os et le montra à Ntsengueleza en lui disant : « Tu vois cet os ? C’est celui du pêcheur, ton voisin qui a disparu il y a un mois. C’est moi qui l’avais mangé. Il était trop curieux, je savais qu’il se doutait de moi. Il voulait se mêler de ce que ne lui regardait pas. » Ntsengueleza, en pleurant lui rappela que ce brave pêcheur ne faisait que prendre de l’eau à l’école coranique quand il partait à la pêche. Le Djinn lui disait : « Raison de plus que je ne te laisserai pas la vie sauve, car tu viens de découvrir un autre secret. Tu mérites mille fois que je te mange crus. Contente-toi que je te laisse jusqu’à demain. Et la promesse que je te fais si tu arrives à te sauver d’ici et rentrer en ville, je te laisserai la vie sauve et je te respecterai durant toute ma vie. Les autres n’ont pas pu échapper, maligne que je te connais, tente ta chance. » Ntsengueleza en entendant la promesse du Djinn, a compris qu’elle n’a aucune chance d’échapper à la mort. Et elle réalise vraiment qu’elle va mourir. Le Djinn l’attacha sur une chaise et lui disait: « A demain Ntsengueleza, sache que je n’ai rien contre toi, mais je ne pourrai te laisser, tu as cassé mon aiguière magique qui était à mon père et qui se transmettait de père en fils. Qu’est-ce que je pourrais donner à mon fils, moi ». Il partait en fermant la porte à double clés. Ntsengueleza tenta deux fois de bouger elle n’a pas pu, elle accepta son sort. Elle pleurait à haute voix et à vives larmes comme un hurluberlu et elle disait des fariboles : « Celle ou celui qui pourra me sauver je lui donnerai tout même mon âme ». Elle a répété à plusieurs reprises cela. Fatiguée de sommeil, elle n’avait rien vu ni entendu. La petite souris qui suivait le Djinn se glissa dans la chambre et rongea les cordes avec lesquelles Ntsengueleza était immobilisée. Lorsqu’elle tombait comme un sac par terre elle se trouvait détachée et se mit à courir par ci, par là, en zigzag, car elle avait encore le sommeil aux yeux, mais elle cherche s’il y a un chemin qui peut l’amener dehors.
C’était vers minuit. Le Djinn n’avait pas donné beaucoup d’importance à la porte, puis que sa demeure se trouvait dans le cœur de la forêt très loin de la ville. Une forêt pleine des bêtes sauvages. Aucun être humain n’y avait posé les pieds. Attacher la porte solidement n’était pas importante pour le Djinn. Le jeune sorcier qui s’était transformé en souris avait aussi défoncé la porte. Ntsengueleza en poussant la porte, elle s’est trouvée dans le noir. Elle a pris son courage à deux mains et elle se disait : « Même si je devrai mourir, le djinn ne se raffolera pas de mon corps. Je préfère être dévorée par les fauves que par lui.» Ntsengueleza entendit des pas derrière elle et en tournant elle ne voyait personne. Elle disait d’une voix tremblante : « Si tu es un être humain, montre-toi et sauve-moi car demain je vais être mangée par un méchant Djinn, mon maître de l’école coranique. Si tu es une bête sauvage qui est venue pour me manger que Dieu te réduit en poussière. » Ainsi Ntsengueleza vit apparaitre devant elle un joli garçon qui avait le même âge que lui, lui dit : « Je suis la petite souris qui suivait le Djinn depuis la ville jusqu’ici. La mission qui m’a été confiée par mon maitre, un grand magicien, était de te sauver de la main du Djinn. Je ne suis pas un Djinn, mais un apprenti magicien. Mon maitre est le plus grand sorcier de toute la région est derrière lui depuis plusieurs années. Ce Djinn avait mangé le petit frère de mon maitre. C’est moi qui avais coupé les cordes avec lesquelles il t’avait attaché les mains et les jambes. J’ai entendu également le vœu que tu avais fait de celui qui pourra te sauver. Tu avais promis de lui donner jusqu’à ton âme. Je vais te sauver et je n’ai pas besoin de ton âme, mais de ton cœur. Si nous arrivons à regagner la ville, je voudrai que tu acceptes de devenir ma femme. Je te promets tous les bonheurs du monde.» Ntsengueleza écouta tout le discours de son sauveur, mais, elle n’a pas placé aucun mot au sujet du mariage. Pour elle, cela est secondaire. Elle devait d’abord avoir la vie sauve. Elle devait rentrer en ville avant le levée du soleil. Elle n’avait pas oublié la promesse du Djinn lorsqu’il disait: « si tu arrives à te sauver d’ici et rentrer en ville, je te laisserai la vie sauve et je te respecterai durant toute ma vie. » Elle disait : « Courons vite. Nous devons être à la maison avant le levée du jour. C’est très important pour moi. Je m’assurerai que ma vie est protégée.» Ils se sont mis en route, ils ont traversé des rivières, surmonté des montagnes. Ils ont fait cinq heures de marche. « Ouf ! Enfin je suis sauvée » disait Ntsengueleza. Personne ne les ont vus rentrer en ville. Le jeune homme disait à Ntsengueleza qu’ils se reverront quand elle sera prête pour le mariage. Elle tenta de le faire entrer à la maison, mais, il refusa. Il lui répondit que cela ne faisait pas partie de sa mission. Son devoir était de la sauver et la faire revenir à la maison. Sa mission est accomplie avec succès. Ntsengueleza rentra à la maison et trouva ses parents, ses frères et sœurs les larmes aux yeux. Ils se disaient déjà qu’elle était mangée par le Djinn. Dès qu’elle rentra toute la maisonnée criait de joie. Tous les voisins se réveillaient et le bruit couru jusqu’aux oreilles de maître Djinn. Il n’a pas cru, car il se disait que Ntsengueleza ne peut pas parcourir la forêt toute seule sans être mangée par les fauves. Tout le quartier se réveilla et alla chez la mère de Ntsengueleza pour la féliciter. Cette fois le Djinn n’a pas pu se retenir. Il se rendit aussi chez la mère de Ntsengueleza. Tout le monde prit la fuite lorsqu’ils l’ont vu entrer croyant que cette fois il allait tous les manger. La mère de Ntsengueleza avait lancé un cri très fort et elle s’évanouissait. Ntsengueleza seule était calme et elle tranquillisa son père et ses voisins. Elle disait : « Ne fuyait pas mon maitre de l’école coranique. Il ne fera de mal à personne. Il n’est pas méchant comme vous le croyez. Il est venu féliciter ma maman de mon arrivée. Ce n’était qu’un test qu’il m’avait fait faire. » Le Djinn entra chez la mère de Ntsengueleza, la félicita de l’arrivée de sa fille et présenta ses excuses devant elle. Il promit devant tout le monde de ne plus faire de mal à personne. Avant de partir, il demanda à Ntsengueleza de rejoindre les autres à l’école coranique.
Au matin, la nouvelle était rependue partout que Ntsengueleza était revenue la vie sauve. Personne n’avait su ce qui se passait, car Ntsengueleza ne racontait à personne ce qui lui était arrivée ou ce qu’elle avait vu dans la forêt. Le djinn avait tenu promesse qu’il lui laissait la vie sauve et la respectait toute sa vie. Le Djinn a juré aussi de ne plus manger les hommes.
Un an après, Ntsengueleza se disait alors qu’elle a une dette envers le jeune magicien qui lui avait sauvé la vie. Elle réalisait également qu’elle était follement amoureuse de lui.